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Les armes nucléaires d’aujourd’hui sont beaucoup plus petites, plus précises et plus puissantes que celles utilisées pendant la Seconde Guerre mondiale (1939-1945). Une guerre nucléaire serait donc dévastatrice bien au-delà des frontières ukrainiennes.
Le président russe Vladimir Poutine l’a annoncé: quiconque tente de s’opposer à son action militaire en Ukraine devra faire face à des « conséquences jamais vues dans l’histoire ». La menace d’un conflit nucléaire met le monde entier en état d’alerte et nous ramène il y a 60 ans, lorsque l’Union soviétique (URSS était composée de la Russie, de l'Ukraine, puis de la Biélorussie et de la Moldavie. Étaient aussi inclus les États de la Transcaucasie : Azerbaïdjan, Arménie et Géorgie.) menaçait de déclencher une guerre nucléaire en armant Cuba de missiles balistiques. Les progrès faits en matière de désarmement depuis n’ont pas empêché la Russie de continuer à développer sa technologie. Aujourd’hui, le pays possède le plus grand arsenal nucléaire du monde, avec près de 6.000 ogives, soit près de la moitié de toutes les armes nucléaires dans le monde.
La technologie a considérablement évolué depuis les premières bombes nucléaires larguées sur Hiroshima et Nagasaki en 1945. Elle est désormais plus complexe: la variété des armes développées permet des attaques à la fois à grande échelle et ciblées, avec une portée plus longue et une force de destruction beaucoup plus grande.
Nous nous sommes penchés sur les armes nucléaires du 21e siècle et sur les conséquences qu’une guerre nucléaire aurait sur le monde.
Comment la technologie des armes nucléaires a-t-elle évolué depuis 1945?
La bombe larguée sur Hiroshima en 1945 pesait environ 4.500 kg et a tué plus de 100.000 personnes. Au fil du temps, des progrès considérables ont été réalisés pour miniaturiser la technologie: les armes nucléaires actuelles sont plus compactes et ne pèsent généralement que quelques centaines de kilos. Elles sont néanmoins capables de tuer des millions de personnes. Cela permet de mener des attaques par divers moyens: des missiles balistiques en passant par des missiles de croisière, n’importe quelle partie de la planète peut être atteinte.
« Beaucoup de ces armes sont beaucoup plus petites, légères et faciles à lancer qu’auparavant. Leur puissance explosive est aussi beaucoup plus grande », explique Stephen Herzog, chercheur au Centre d’études sur la sécurité de l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ). Certaines des armes nucléaires dont dispose la Russie aujourd'hui sont plus de 50 fois plus puissantes que celles larguées sur Hiroshima et Nagasaki.
À quoi ressemble l’arsenal nucléaire de la Russie ?
La Russie dispose d’un arsenal nucléaire très varié, qui lui permet de lancer des attaques depuis la terre, la mer et l’air: c’est ce qu’on appelle la « triade nucléaire ». Les États-Unis et la Chine en sont également capables. Les armes terrestres sont des missiles balistiques ou de croisière, dont certains ont une portée intercontinentale et peuvent atteindre des cibles très éloignées, comme la Chine ou les États-Unis. D’autres ont une portée plus courte et peuvent cibler le continent européen.
Les missiles lancés depuis la mer, à partir de sous-marins, sont difficiles à localiser car ces sous-marins peuvent être immergés aux quatre coins du globe. Les bombes les plus lourdes restent transportées par voie aérienne, dans des bombardiers stratégiques en mesure de parcourir de longues distances. L’avantage de la triade est qu’elle offre une grande force de dissuasion ainsi qu’une utilité et une flexibilité stratégiques supérieures. Ces plateformes éparpillées rendent également l’arsenal plus robuste ou plus difficile à détruire en cas de guerre.
Comment différents types d’armes peuvent-ils être utilisés ?
Les armes nucléaires stratégiques sont généralement utilisées pour cibler des villes. « Mais elles peuvent également être utilisées pour cibler d’importants moyens militaires, comme des bases et des groupes d’attaque navale en mer », précise Stephen Herzog. Les armes tactiques ou non stratégiques, quant à elles, sont des armes de faible puissance conçues pour être utilisées sur le champ de bataille comme « égalisateur de forces », c’est-à-dire pour faire pencher un conflit en sa faveur. La Russie possède environ 1.900 armes nucléaires tactiques.
Quels sont les scénarios de conflit possibles ?
La Russie décide de lancer une attaque nucléaire contre l’Ukraine ou tout autre pays intervenant pour soutenir le gouvernement ukrainien, il est plus probable qu’elle utilise des armes nucléaires tactiques sur le champ de bataille que de grosses ogives stratégiques, que les États-Unis pourraient interpréter comme une attaque directe contre l’OTAN, estime le chercheur Alexander Bollfrass du Centre d’études sur la sécurité de l’EPFZ.
Une attaque à grande échelle risquerait en effet d’activer les forces de dissuasion des alliés de l’OTAN, explique Alexander Bollfrass. L’utilisation d’armes nucléaires tactiques, ajoute-t-il, permettrait à l’armée russe de détruire des points militairement stratégiques en Ukraine.
Outre les attaques préméditées, il faut tenir compte du risque d’accident, qui augmente lors du transport d’ogives nucléaires ou lors de combats à proximité de centrales nucléaires, comme c'est déjà le cas près de Zaporijjia, où se trouve la plus grande centrale nucléaire d’Europe. L’armée russe a récemment été accusée d’avoir endommagé la centrale en bombardant certains bâtiments avant d’en prendre le contrôle. Cet acte constitue une menace sérieuse pour la sécurité de l’ensemble de l’Europe.
Les tensions nucléaires et les armes en état d’alerte augmentent également le risque de mauvaise interprétation et d’escalade du conflit.
Quels dommages les armes nucléaires d’aujourd’hui pourraient-ils causer?
Si la Russie devait déployer la totalité de son arsenal nucléaire, une partie de la Terre deviendrait inhabitable et le monde tel que nous le connaissons n’existerait plus, affirme Stephen Herzog.
Mais même le déploiement d’une petite partie seulement de cet arsenal entraînerait des conséquences dévastatrices à long terme.
« La surpression atmosphérique provoquée par l’onde de choc d’une explosion nucléaire serait capable de détruire des bâtiments entiers jusqu’à des dizaines de kilomètres de distance, à l’exception de ceux en béton armé », explique-t-il.
Des centaines de milliers de personnes pourraient être instantanément tuées ou blessées par les débris ou l’effondrement des bâtiments. En outre, l’explosion créerait des ondes lumineuses visibles, infrarouges et ultraviolettes qui se combineraient pour produire une sorte de grosse boule de feu très chaude capable de tout brûler et d’infliger des brûlures au troisième degré dans un rayon encore plus grand que celui des dégâts de l’explosion.
Les populations contaminées auraient à faire face aux retombées radioactives ultérieures, qui peuvent provoquer des tumeurs et des malformations congénitales.
Quels sont les risques pour le reste du monde?
La technologie actuelle des armes atomiques permet d’anéantir des métropoles entières, même si elles sont situées à de grandes distances. « Chaque grande ville des États-Unis est potentiellement à une demi-heure de la destruction, et chaque grande ville des pays de l’OTAN en Europe est à environ vingt minutes d’être détruite par l’un de ces missiles balistiques », explique Stephen Herzog.
La Suisse et l’Autriche sont moins menacées en raison de leur neutralité, mais les effets des radiations pourraient être énormes sur toute l’Europe continentale, y compris en Suisse, et seraient similaires à ceux provoqués par la fusion d’une centrale nucléaire, « même si des armes nucléaires tactiques sont utilisées sur le champ de bataille », précise le chercheur.
Quelle est la probabilité d’une attaque nucléaire?
À ce jour, la probabilité que la Russie utilise des armes nucléaires est encore faible, mais le risque n’est pas nul. Il est plus probable que Vladimir Poutine décide d’utiliser des armes chimiques avant les armes nucléaires. Ces armes, en plus d’être considérées comme moins taboues par le président russe, permettent de réfuter plus facilement les preuves, car « en cas d’attaque, il est plus facile de rejeter la faute sur les forces ukrainiennes, alors qu’une attaque nucléaire ne laisse aucun doute sur les responsables », explique Sephen Herzog.
Mais il ne faut pas oublier que la guerre en cours n’oppose pas que la Russie à l’Ukraine, mais la Russie à l’Ukraine aidée des armes et renseignements que l’occidentaux lui fournit. Une escalade ne peut pas être exclue. C’est pour cela que la menace nucléaire est si effrayante,
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