Cliquez ici pour consulter la documentation la plus récente
Le gouvernement ukrainien affirme que plus de 20 000 volontaires étrangers ont pris les armes pour combattre l'armée russe en Ukraine. Le président ukrainien a lancé un appel aux bonnes âmes voulant combattre l’ennemi russe, qui a résonné dans le monde entier. Comment se passe la constitution de ces bataillons ? Qui peut les rejoindre ?
Ils veulent se battre pour l'Ukraine. Des milliers de volontaires ont déjà rejoint les soldats de l'armée ukrainienne face à l'invasion russe lancée le 24 février 2022. Venus de pays de l'Union européenne, du Royaume-Uni ou encore de Géorgie, ces civils – souvent d'anciens-militaires – grossissent les rangs de la Légion internationale de défense territoriale lancée par le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Composition, missions, reconnaissance par les Etats.
1. En quoi consiste cette nouvelle unité ?
C'est par un décret signé le 28 février 2022 que le président Volodymyr Zelensky a formellement autorisé les ressortissants étrangers souhaitant rejoindre la Légion internationale à entrer sans visa sur le territoire national. Tout citoyen non-ukrainien peut théoriquement rejoindre cette unité, à l'exception des citoyens de Russie, décrite comme "l'Etat agresseur".
A ce stade, rien ne permet de confirmer que cette légion internationale fait partie intégrante de l'armée régulière ukrainienne. Mais elle y est tout de même rattachée, et les volontaires étrangers sont invités à signer un contrat et à remettre certains documents (passeport, preuve d'expérience militaire ou policière…) à l'ambassade d'Ukraine de leur pays avant le départ. Ce sont d'ailleurs les attachés de défense du réseau diplomatique ukrainien qui supervisent le recrutement des combattants étrangers, ainsi que leur voyage vers l'Ukraine.
Peu d'informations ont filtré sur les missions confiées aux combattants étrangers. "Tout dépend des qualifications et de l'expérience de chacun", explique simplement une source diplomatique ukrainienne. Les volontaires sont généralement affectés dans des groupes dont les membres ont la même nationalité (ou parlent la même langue) afin de faciliter la communication. Quant aux profils hautement qualifiés, certains ont déjà intégré une unité de forces spéciales créée pour l'occasion, d'après un communiqué du ministère de la Défense ukrainien publié le 7 mars 2022.
2. Combien de combattants étrangers ont rejoint l'Ukraine ?
Là encore, ce nombre est difficile à établir. Le ministre ukrainien des Affaires étrangères déclarait le 6 mars 2022 que "près de 22.000 volontaires" avaient déjà rejoint la Légion fraîchement créée. "Ils l'ont fait de leur plein gré, l'Ukraine ne les a pas incités ni payés" pour s'engager, a-t-il commenté. Alors que l'invasion russe dure depuis deux semaines, la presse européenne fait en tout cas état de nombreux départs à travers le continent. Des candidats à la guerre, "surtout des jeunes" en Espagne dont certains "n'ont encore rien dit à leurs familles". Des citoyens belges, mais aussi italiens, marocains, luxembourgeois se sont quant à eux manifestés à Bruxelles.
En France, plusieurs dizaines de personnes, presque exclusivement des hommes, sont déjà parties ou sur le point de rejoindre l'Ukraine. Les rares qui ont accepté de parler à la presse ont souvent une expérience militaire, comme ce Finistérien de 57 ans qui est vétéran de l'armée de terre. D'autres, moins expérimentés, tentent tout de même de rallier les zones de guerre pour prêter main-forte. C'est le cas de d'un Niçois de 25 ans, ancien employé de pompes funèbres veut faire le voyage avec une dizaine d'autres Français.
Cette Légion internationale n'est en tout cas pas le premier groupe de combattants étrangers actif en Ukraine. Depuis 2014, et l'éclatement de la guerre entre gouvernement ukrainien et séparatistes prorusses dans le Donbass, des centaines de volontaires se sont enrôlés dans divers groupes paramilitaires loyalistes, dont la Légion géorgienne. Cette unité, dont le nombre de soldats n'est pas clairement établi (entre 70 et plusieurs centaines de combattants) est majoritairement composée de Géorgiens désirant repousser l'armée russe déjà impliquée en 2008 dans une guerre de sécession en Ossétie du Sud.
3. Quelles sont les motivations de ces volontaires ?
Comme l'a décrit le journaliste américain spécialisé en défense Christopher Miller, actuellement envoyé spécial en Ukraine, les combattants occidentaux dans le pays viennent de tous les horizons politiques. Jusqu'à l'invasion russe, on retrouvait surtout en Ukraine des mercenaires et des activistes ou anti-Russie, un engagement idéologique extrémiste d'ailleurs documenté par les chercheurs indépendants du Counter Extremism Project.
Parfois pro-démocratie, anti-Otan, néonazis ou d'extrême gauche, ces militants continuent d'affluer en très petits nombres vers l'Ukraine. Dix hommes liés à l'extrême droite ont par exemple été identifiés parmi les volontaires allemands partis en Ukraine, comme l'a révélé le ministère allemand de l'Intérieur lors d'une conférence de presse, le 4 mars 2022.
Mais la tournure que prend le conflit en Ukraine semble motiver de nombreux Occidentaux veulent à tout prix éviter une nouvelle avancée russe en Europe, comme l'expliquait un Niçois de 25 ans "Je souhaite le respect de la souveraineté d'un Etat. Quand la France a été occupée, on était bien content de trouver de l'aide." Le spectre des tueries de masse et d'une crise humanitaire pousse aussi à l'action. "Il est facile de voir qui sont les bons et les mauvais dans ce conflit, c'est différent des autres conflits récents" selon David Ribardo, un vétéran américain qui ne peut pas se rendre en Ukraine, mais il facilite le départ d'anciens militaires grâce à un site internet communautaire.
4. Que risquent ces légionnaires, au niveau juridique, à leur retour ?
La réponse varie fortement selon la législation du pays d'origine. Côté français, le Quai d'Orsay déconseille formellement tout déplacement en Ukraine. Mais aucune sanction ne peut être prise à l'encontre d'un volontaire prêt à se battre pour une armée étrangère – sauf s'il s'agit d'un pays officiellement en guerre avec la France ou d'une organisation reconnue comme terroriste. Les militaires employés par l'armée française n'ont toutefois pas le droit de rejoindre une zone de conflit de leur propre chef, comme cela a été rappelé aux quatorze soldats de la Légion étrangère interpellés le 2 mars 2022 alors qu'ils s'apprêtaient à rejoindre la Pologne.
Comme en France, le principe de neutralité prévaut chez nos voisins, à quelques exceptions près. En Tchéquie, où un tel engagement est passible de prison, le Premier ministre Petr Fiala, a officiellement assuré qu'une amnistie serait accordée aux Tchèques désirant prendre les armes aux côtés des Ukrainiens. A l'inverse, les autorités britanniques ont rappelé que des sanctions pénales ou administratives pourraient être prononcées dans de tels cas.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire