vendredi 24 décembre 2021

(FR) Fonte massive de la banquise arctique

 

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Le glacier Thwaites qui se situe à l’ouest du continent Antarctique inquiète les chercheurs // PHOTO : Stuart Rankin/flickr

La banquise et ses pains de glace massifs flottent au pôle Nord depuis 100 000 ans. Si la mer gèle à chaque hiver et préserve la banquise, il ne reste pas moins que l’avenir de cette dernière est en sursis. Le réchauffement climatique accélère grandement la fonte massive de la banquise arctique.

Le glacier Thwaites est de plus en plus fragile. Alors qu’il déverse déjà une quantité importante de glace en mer, une partie pourrait bientôt s’en détacher. La climatologue Catherine Ritz détaille les conséquences d’un désastre presque inévitable.


En Antarctique, les plates-formes glaciaires ont dangereusement fondu. © Nasa ICESat et ICESat-2 


« L’effondrement final de la dernière plate-forme glaciaire de Thwaites, qui représente un tiers du glacier, pourrait débuter par le croisement de fissures et de crevasses cachées dans un délai aussi rapide que 5 ans », écrivent les glaciologues dans une dernière étude. Grâce à des données satellites, des radars souterrains et des mesures GPS, ils ont observé des cassures sur cette plate-forme qui sert de contrefort au glacier. 

Sous l’effet du réchauffement climatique, des fissures alarmantes menacent le « glacier de l’Apocalypse ». La disparition du glacier Thwaites, 120 km de large, 600 km de long et 3 km de profondeur peut engendrer des conséquences dramatiques pour le continent Austral. Catherine Ritz, directeur de recherche au CNRS à l’institut des géosciences de l’environnement de Grenoble, alerte sur la situation.


© Gaëlle Sutton/Reporterre


Le talon d’Achille de l’Antarctique

Ce « glacier de l’Apocalypse », Catherine Ritz, a tendance à le qualifier comme le « talon d’Achille de l’Antarctique ». Ce glacier est vulnérable. Il a déjà subi beaucoup de variations récentes. C’est un glacier qui gouverne un bassin versant très grand. S’il s’effondre, cela va entraîner une très grande masse de glace, et faire grimper de 1 à 2 mètres le niveau des mers à une échéance de quelques siècles, explique la glaciologue.


La banque Arctique se forme sur l’océan. En fondant, elle laisse à place à la surface de l’océan qui absorbe davantage les rayons solaires et amplifie le réchauffement © NASA

Aujourd’hui, ce qui l’empêche encore de tomber est cette partie flottante fragilisée. L’effondrement de cette plate-forme va en effet accélérer le détachement du glacier et sa fonte dans les eaux de l’océan. Thwaites contribue déjà à l’élévation du niveau de la mer et cette contribution pourrait même s’aggraver d’un quart avec la disparition de la dernière plate-forme. « C’est un peu comme un bouchon qu’on retire », illustre Catherine Ritz.


Le point de bascule

La climatologue Catherine Ritz ne souhaite pas parler, ici, de ses espérances, mais plutôt de ses inquiétudes. « La fonte de ce glacier contribue déjà à l’élévation du niveau des mers. On voit que cette région de l’Antarctique s’abaisse d’une façon très significative, et que ça a même tendance à s’amplifier », analyse-t-elle. « On étudie beaucoup ce glacier parce qu’on sait qu’il n’est pas très loin de tomber dans un point de bascule. Il n’est plus très loin du point de non-retour. On parle d’un petit seuil qui se trouve en amont de là où il se met à flotter. S’il passe ce point de bascule, il n’y aura plus rien pour l’arrêter », alerte la climatologue.


Iceberg dans l'Arctique• Crédits : Patrick Poendl - Fotolia

« La fracturation de sa partie flottante s’accélère et dans quelques années certaines parties vont complètement se casser. Cela peut vite dégénérer, on sait que c’est une région fragile. D’ici 4-5 ans, les conséquences des fracturations successives risquent de sonner le glas du glacier. Sa ligne d’échouage (ligne entre la partie posée et la partie flottante) recule à une vitesse de 2 kilomètres par an en ce moment et cela est énorme », regrette-t-elle.


Des conséquences sur tout le continent

« 30 cm d’élévation du niveau des mers représente quelque chose de considérable. C’est très important, cela affecte des millions de personnes. Les jours des tempêtes, la dépression fait monter le niveau des mers et là ça fait des vagues de submersion. Des choses qui arrivaient une fois tous les 100 ans, risquent d’arriver tous les ans. », explique-t-elle.


Carte des terres du Groenland, en retirant la couche de glace.


Si tout le glacier venait à disparaître, le niveau de la mer monterait de 65 cm. Tout l’Antarctique de l’Ouest, qui contient suffisamment de glace pour faire grimper les océans de 3,3 mètres, serait alors menacé.


Carte des épaisseurs de l'inlandsis du Groenland ; GISP2 indique le site principal du Greenland Ice Sheet Project où a été extraite une carotte de glace de trois kilomètres de longueur.


La fonte de ce glacier déstabilise tous les autres glaciers de l’Antarctique de l’Ouest. « À terme, cet effondrement se propage sur les glaciers environnants, qui s’effondrent ensuite. On sait que certains sont déjà entrés dans cette « boucle » de victimes. Comme le Pine Island Glacier qui risque de disparaître également »,

« Les glaciers antarctiques ont presque tous des socles sous le niveau de la mer. Chaque glacier est donc à risque face à la montée du niveau de la mer. Pour l’instant ces deux-là (glacier de l’Apocalypse et Pine Island Glacier) sont les plus à risques. Mais on voit des frémissements à d’autres endroits en Antarctique. Le réchauffement de l’océan grignote les parties flottantes et du coup enlèvent les bouchons de protection de ces glaciers », s’inquiète-t-elle.


Le reste du monde pas mieux loti

Prenons un autre exemple. Selon la climatologue Catherine Ritz, le Groenland a d’autres raisons d’être instable. « Plus la calotte glaciaire fond, plus le Groenland s’abaisse. Et plus il s’abaisse, plus la température à sa surface est élevée et donc plus la calotte fond. C’est un cercle vicieux. Passer un certain seuil, on ne peut plus rien faire. Au Groenland, c’est la calotte glaciaire qui contribue le plus à la montée du niveau des mers, encore plus qu’en Antarctique », explique-t-elle.


La calotte glaciaire du Groenland fond sept fois plus vite que dans les années 1990, selon une étude publiée dans la revue « Nature ». — KONRAD K./SIPA

« Les glaciers de montagnes vont extrêmement mal. En Alaska par exemple, on note beaucoup de perte de glace. Les glaciers en France sont surveillés aujourd’hui. En Himalaya les glaciers servent de réservoirs d’eau et s’ils disparaissent les populations risquent d’en souffrir », alerte-t-elle. 


L’observation de la calotte groenlandaise par satellites à orbite polaire

Après les premières informations obtenues par les satellites imageurs optiques au-début des années 1960, les premières mesures dédiées à l’observation des glaces remontent au début des années 1990. L’imagerie optique a en effet vite été jugée trop limitée, car elle n’est pas utilisable pendant la nuit polaire et en présence de nuages.


Fonte de la calotte glaciaire 2012
La NASA n'avait jamais vu cela depuis plus de trente ans d'observation satellitaire.
Selon les données de trois satellites analysées par l'Agence spatiale américaine et des scientifiques universitaires, environ 97% de la calotte glacière avait dégelé à la mi-juillet. Contre habituellement jusqu'à 55%.


Trois types de mesures sont principalement utilisés :

1. L’imagerie radar à synthèse d’ouverture (SAR) permet, par suivi temporel, de cartographier l’évolution des limites englacées, et de visualiser les changements de distribution d’éléments reconnaissables de la surface glaciaire, et ainsi des vitesses d’écoulement des glaciers

2. L'altimétrie, radar ou optique (lidar), permet de mesurer le profil de variation le long de la trace du satellite de l’altitude de la surface des glaces. Cette altitude est déduite de leur distance à la surface d’un satellite dont l’altitude est connue en permanence de façon précise. 

3. La gravimétrie permet de mesurer les variations de la répartition des masses de la terre : la mission GRACE (NASA et DLR, 2002-2017) suivie de GRACE-FO (lancé en 2017) fonctionne avec 2 satellites qui orbitent en tandem et mesurent les variations de leur distance respectives dues aux variations de la gravité locale. Au-dessus des zones polaires ces satellites fournissent ainsi très directement les changements affectant les masses de glace (répartition, fonte ou accumulation).







Inlandsis du Groenland
https://fr.wikipedia.org/wiki/Inlandsis_du_Groenland

La calotte glaciaire groenlandaise, quelle influence sur les changements climatiques et le niveau de la mer?
https://argonautes.club/calotte-glaciaire-groenland-influence-sur-climat-et-niveau-mer.html

Fonte impressionnante de la calotte glaciaire du Groenland
https://www.franceculture.fr/sciences/fonte-impressionnante-de-la-calotte-glaciaire-du-groenland

La fonte des calottes glaciaires mesurée précisément par les satellites de la Nasa
https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/climatologie-fonte-calottes-glaciaires-mesuree-precisement-satellites-nasa-19846/

En Antarctique, le « glacier de l’Apocalypse » se fissure et menace le continent
https://www.natura-sciences.com/environnement/antarctique-glacier-de-lapocalypse.html

La fonte du « glacier de l’Apocalypse », en Antarctique, effraie les scientifiques
https://reporterre.net/La-fonte-du-glacier-de-l-Apocalypse-en-Antarctique-effraie-les-scientifiques











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