mardi 11 juillet 2023

(FR) Les raisons qui ont poussé les États-Unis à fournir des armes à sous-munitions à l'Ukraine

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Écorché de démonstration d’une ogive de missile Honest John. Les sous-munitions M139 au sarin sont bien visibles. https://fr.wikipedia.org/wiki/Arme_%C3%A0_sous-munitions

Joe Biden outrepasse une loi sur l’aide à l’étranger qui interdit normalement l’exportation de munitions avec un taux d’échec supérieur à 1 %.

« Cela a été une décision très difficile pour moi. » Joe Biden ne s’en est pas caché après avoir annoncé, vendredi 7 juillet 2023 au soir, que les États-Unis enverront des armes à sous-munitions à Kiev dans le cadre d’un nouveau programme d’aide militaire. Au 500e jour de la guerre en Ukraine, cette décision représente une victoire diplomatique pour Kiev, mais qui n’est pas sans risque pour sa population.

Depuis février 2022, les États-Unis envoient un armement de plus en plus important à l’Ukraine, notamment des systèmes de missiles Patriot et des chars lourds ; mais avec l’envoi de ces bombes à sous-munitions, une nouvelle ligne a été franchie, et pour plusieurs raisons.

D’abord, ces armes sont dangereuses pour les civils puisqu’elles dispersent sur une zone grande comme plusieurs terrains de football une multitude de petits explosifs, dont une partie importante n’explose pas et s’enterre dans le sol, à l’instar des mines. Ensuite, la production et le stockage de ces bombes sont interdits par le traité d’Oslo adopté en 2008, signé par 123 pays, dont la France, mais pas par les États-Unis. En revanche, Washington transgresse une autre loi, américaine cette fois, sur l’exportation de munitions ayant un taux d’échecs trop important.


« Dans l’intérêt de la sécurité nationale »

En vertu de cette loi dite « Foreign Assistance Act » (loi sur l’aide à l’étranger), il est interdit de produire, d’utiliser, ou d’exporter des armes dont le taux d’échec est supérieur à 1 %. Or, comme le rapporte le média Voice of America, les munitions que les États-Unis vont fournir à Kiev ont un taux de ratés de 2,35 %. Ce taux plus élevé signifie qu’un plus grand nombre de petites bombes dispersées par les armes à sous-munitions n’explosent pas à l’impact, représentant donc un risque plus important sur le long terme pour les civils.

Pour passer outre cette législation, Joe Biden a une solution : invoquer l’article 614 de ce texte qui permet exceptionnellement au président américain d’envoyer n’importe quelle aide si cela est dans l’intérêt de la sécurité nationale des États-Unis.

Après l’annonce de cette décision controversée, le général américain Pat Ryder, a affirmé que les anciens modèles, avec un taux supérieur à 2,35 % d’échec, ne seront pas envoyés, rapporte l’agence AP. Puis, il a assuré que les États-Unis « choisiraient soigneusement des munitions ayant un taux de ratés les plus faibles, pour lesquelles nous disposons de données d’essai récentes ».


Biden poussé dans ses retranchements par le Pentagone

Colin Kahl, sous-secrétaire à la Défense, a lui aussi tenté de rassurer lors d’une conférence de presse vendredi, en expliquant que l’Ukraine avait donné « l’assurance par écrit » qu’elle n’utiliserait pas les armes à sous-munitions dans les zones urbaines « peuplées de civils, et qu’il y aurait une comptabilité minutieuse des endroits où ces armes sont utilisées ».

Il n’empêche que le danger que représentent ces armes a fait douter pendant plusieurs semaines le chef de l’État, compte tenu du nombre de pays qui ont interdit ces munitions dans le monde. Selon des responsables américains interrogés par CNN, c’est le Pentagone qui aurait insisté auprès de Joe Biden. Le département de la Défense aurait fait valoir auprès du chef de l’État que les munitions de l’armée de Kiev étaient au plus bas, et lui aurait conseillé de fournir, au moins temporairement, des armes à sous-munition à l’Ukraine.

La situation actuelle sur le front a sans doute été un argument supplémentaire qui a fait pencher la balance. Les gains de la contre-offensive ukrainienne débutée en juin 2023 sont en effet pour le moment très limités, et Volodymyr Zelensky a concédé jeudi, dans un entretien à CNN, que la contre-offensive de ses troupes était « ralentie » par l’armée russe. L’ambassadeur de Russie en Biélorussie, Boris Gryzlov, a estimé samedi que la décision des États-Unis était « un geste de désespoir » pour donner un dernier élan à une contre-offensive qui semble ne pas se passer aussi bien que prévu.







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