jeudi 21 novembre 2024

(FR) Naturalisation en France : conditions et demande

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La naturalisation en France est le processus juridique par lequel une personne étrangère acquiert la nationalité française. Cette procédure repose sur plusieurs critères et démarches administratives et permet à l’individu de bénéficier des droits et des obligations attachés à la citoyenneté française.


C’est quoi la naturalisation en France ?

Naturalisation : obtenir la citoyenneté française

La naturalisation est un acte administratif qui permet à un étranger de devenir citoyen français. La naturalisation est accordée sous certaines conditions, notamment la durée de résidence en France, avec un séjour de cinq ans requis pour les étrangers, bien que ce délai puisse être réduit.

Décret de naturalisation

Le décret de naturalisation est le dispositif juridique par lequel l’État français accorde la nationalité française à un étranger par la procédure de naturalisation. Il s’agit d’une décision administrative qui intervient après un examen approfondi de la demande, et ce, selon des critères fixés par la loi.

Un décret régi par le Code civil

Le décret de naturalisation repose sur le Code civil français, et plus particulièrement sur l’article 21-17 qui précise les conditions sous lesquelles un étranger peut devenir citoyen français. Le décret est signé par le ministre de l’Intérieur, suite à l’instruction du dossier du demandeur.

Un décret régi par le Code civil

Le décret de naturalisation repose sur le Code civil français, et plus particulièrement sur l’article 21-17 qui précise les conditions sous lesquelles un étranger peut devenir citoyen français. Le décret est signé par le ministre de l’Intérieur, suite à l’instruction du dossier du demandeur.


Quels sont les quatre moyens d’obtenir la nationalité française ?

La nationalité par naissance (droit du sol)

Les enfants nés en France de parents étrangers peuvent obtenir la nationalité française de manière automatique s’ils remplissent certaines conditions, notamment s’ils ont résidé en France pendant cinq ans après l’âge de 11 ans. Les enfants nés en France de parents inconnus ou apatrides acquièrent, eux, automatiquement la nationalité française.

La naturalisation par filiation (droit du sang)

Autre possibilité : une personne peut obtenir la nationalité française par filiation, c’est-à-dire par la naissance d’un parent français. Si l’un des parents est français, l’enfant peut devenir français, qu’il soit né en France ou à l’étranger. Ce principe repose sur le droit du sang (jus sanguinis).

La naturalisation par mariage

Un(e) étranger(ère) marié à un(e) Français(e) peut demander la naturalisation après un certain nombre d’années de mariage. Il faut justifier de quatre ans de mariage (si la personne vit à l’étranger, le délai est porté à cinq ans) et démontrer une vie commune stable. Si le couple réside en France, l’étranger peut faire une demande après quatre ans de mariage.

La nationalité par naturalisation

La naturalisation est soumise à une série de conditions administratives. Ce processus est initié par une demande auprès des autorités françaises, qui examinent la situation de l’individu avant d’accorder ou non la nationalité.


Quelles sont les conditions pour obtenir la naturalisation ?

Une procédure discrétionnaire

Il est important de noter que la procédure de naturalisation est discrétionnaire. Même si toutes les conditions d’accès sont remplies, l’administration peut refuser la demande si elle estime que le demandeur n’est pas suffisamment intégré ou a commis des actes incompatibles avec la nationalité française.

Âge minimal

Le demandeur peut entamer la procédure de naturalisation à partir de l’âge de 17 ans. Cependant, la naturalisation ne pourra être effective qu’à compter de 18 ans. Cette flexibilité permet aux jeunes étrangers résidant en France depuis leur enfance de débuter leur parcours pour devenir citoyens français à un âge précoce, tout en respectant la majorité légale.

Résidence en France

Il est aussi nécessaire de résider en France de manière régulière et continue depuis au moins cinq ans. Ce délai peut être réduit à deux ans si le demandeur a obtenu un diplôme français de niveau Master ou supérieur, ou s’il a rendu des services exceptionnels à la France dans les domaines scientifique, culturel, sportif ou économique.

Intégration professionnelle

Le demandeur doit prouver son intégration professionnelle stable. Cela se traduit par un contrat de travail en cours ou une activité professionnelle indépendante qui démontre que le demandeur participe activement à la vie économique de la France.

Connaissance de la langue française

Autre condition d’accès : il est indispensable de démontrer une maîtrise suffisante de la langue française, tant à l’oral qu’à l’écrit. Cette maîtrise est évaluée selon le niveau B1 du Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL).

Ce niveau signifie que le demandeur doit être capable de comprendre et de produire des phrases simples, de participer à une conversation courante et de comprendre des documents écrits dans un contexte quotidien.

Adhésion aux valeurs de la République

Les demandeurs doivent aussi démontrer une connaissance suffisante de l’histoire, de la culture et de la société françaises, et adhérer aux principes et valeurs essentiels de la République. Il s’agit de garantir que la personne respectera les principes essentiels de la laïcité, des droits de l’homme et de la citoyenneté.

Casier judiciaire

Dernière condition d’accès : le demandeur ne doit pas avoir de condamnations pénales incompatibles avec l’acquisition de la nationalité française. Cela signifie que toute personne ayant été condamnée pour des faits graves (terrorisme, atteintes aux principes de la République, etc.) verra sa demande de naturalisation rejetée.


Quels sont les effets de la naturalisation ?

Le décret de naturalisation est un dispositif qui confère à l’individu la nationalité française. Une fois le décret publié, le nouvel acteur citoyen peut jouir de tous les droits et devoirs associés à la nationalité française, tels que :

- le droit de vote et d’éligibilité ;

- l’accès à la fonction publique ;

- la possibilité de rejoindre un conjoint ou ses enfants en France dans certaines situations de regroupement familial ;

- la protection consulaire dans les pays étrangers où la France est représentée.


Étrangers vivant en France : comment obtenir la nationalité française par naturalisation ?

Faire sa demande de naturalisation en ligne

Depuis le 6 février 2023, la nouvelle procédure de naturalisation impose que toutes les demandes soient réalisées en ligne (https://administration-etrangers-en-france.interieur.gouv.fr). Ce service simple est accessible depuis un ordinateur ou un smartphone.

Soumettre la demande

Pour soumettre votre demande, suivez la marche à suivre :

- Rendez-vous sur le site, puis utilisez vos identifiants FranceConnect ou créez un compte sur la plateforme.

- Complétez ensuite le formulaire en ligne en fournissant les informations requises.

- Numérisez ou photographiez (si vous n’avez pas le matériel informatique nécessaire) les documents justificatifs demandés.

- Téléversez-les sur la plateforme.

Une fois la demande soumise, vous pourrez suivre son état d’avancement directement depuis votre espace personnel sur la plateforme.

Documents à joindre au dossier

Les documents à joindre au dossier de demande de naturalisation varient selon chaque situation, mais en règle générale, vous devrez fournir les éléments suivants :

- Justificatifs d’identité : une copie de votre passeport, de votre carte d’identité ou de tout autre document officiel qui prouve votre nationalité et votre identité.

- Justificatifs de domicile en France : des documents qui prouvent votre résidence régulière et continue en France (bail, quittances de loyer, factures, etc.).

- Preuves de votre insertion professionnelle ou académique : bulletins de salaire, contrat de travail, attestations d’employeurs, diplômes, etc.

- Certificat de langue française : un diplôme ou une attestation de votre maîtrise de la langue, avec un niveau B1 oral.

- Extrait de votre casier judiciaire étranger.

Entretien de naturalisation

Après l’instruction du dossier, une enquête administrative est mise en place pour vérifier les renseignements fournis. Si le dossier est jugé conforme, vous êtes ensuite convoqué à un entretien de naturalisation. Lors de l’entretien, un agent de la préfecture évalue votre assimilation à la culture et aux valeurs françaises. Une fois l’entretien passé, le dossier sera soumis à une décision.

Délai de traitement et réponse

L’administration dispose ensuite d’un délai de 18 mois pour répondre à la demande.

- Si cette réponse est favorable, le demandeur reçoit un courrier l’informant de son inscription dans le décret de naturalisation, après sa publication au Journal officiel (JO).

- En cas de décision défavorable, un recours peut être porté auprès du ministre chargé des naturalisations avant toute démarche contentieuse.


Naturalisation des étrangers vivant hors de France : comment faire sa demande de nationalité française ?

Les mêmes conditions que pour les résidents français

Les conditions sont identiques à celles requises si la demande était effectuée sur le sol français. Les conditions d’assimilation à la communauté française (histoire, connaissance de la langue française, moralité et absence de condamnations pénales, etc.) sont aussi les mêmes que pour une procédure lancée sur le territoire national.

Et des conditions spécifiques

Par dérogation, même s’il réside à l’étranger, le demandeur peut être naturalisé par décret sous réserve de remplir certaines conditions spécifiques :

- Exercer une activité professionnelle publique ou privée pour le compte de l’État français ou d’un organisme dont l’activité présente un intérêt pour l’économie ou la culture française.

- Faire son service national ou être engagé dans une formation de l’armée française.

- Être volontaire du service national universel.

Démarches à réaliser

La demande de naturalisation s’effectue également via le formulaire 12 753 accompagné d’un timbre fiscal à 55 euros.

Sauf exception, les documents rédigés en langue étrangère doivent être accompagnés de leur traduction par un traducteur agréé ou habilité. Les actes publics étrangers doivent aussi être légalisés ou apostillés (cachet apposé par le bureau d’état civil ou le ministère des Affaires étrangères ayant délivré l’acte).

Se faire aider

Pour toute assistance supplémentaire, le Centre de Contact Citoyen (CCC) est disponible au 0806 001 620 (appel gratuit depuis un poste fixe) ou via le formulaire de contact en ligne sur le site de l’ANTS. Des points d’accueil numérique sont également disponibles dans certaines préfectures.


YouTubeNaturalisation Française 2024 : Les 10 pièges et erreurs à éviter Absolument !






jeudi 14 novembre 2024

(FR) Etats-Unis : Donald Trump nomme Tol Homan à la tête de l’agence du contrôle de l’immigration et des frontières

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MEGAN VARNER / AFP
Les promesses de Trump sur l’immigration ont désormais un visage bien connu du premier mandat du président américain de 78 ans, Tom Homan.


Tol Homan ou Thomas Homan, "le tsar des frontières" de Donald Trump, revient à la tête de l'agence américaine de l'immigration. Cet ancien policier de 62 ans va diriger l'agence responsable du contrôle des frontières et de l'immigration (ICE) une fois l'investiture du nouveau président effective. Des premières nominations. Le président élu américain Donald Trump a annoncé dimanche 10 novembre 2024 le retour de Tol Homan, un tenant de la ligne dure, à la tête de l'agence responsable du contrôle des frontières et de l'immigration (ICE).


Voici les choses à savoir sur cette figure éminente de la politique migratoire américaine, à l’approche résolument stricte en matière de sécurité frontalière.

Un ancien policier

Thomas Douglas Homan, né en 1961 à New York, est un ancien policier américain qui a commencé sa carrière au Service de naturalisation et d’immigration des États-Unis, avant de rejoindre la patrouille frontalière. En 2013, il est nommé directeur adjoint exécutif des opérations de contrôle et d’expulsion au sein de l’ICE (Immigration and Customs Enforcement) sous la présidence de Barack Obama. En reconnaissance de son travail, le 44e président des Etats-Unis lui décerne en 2015 le Presidential Rank Award, une distinction réservée à un groupe restreint de hauts fonctionnaires pour leurs résultats notables. En 2016, un portrait publié par le Washington Post le qualifie en ces termes : "Thomas Homan expulse des gens. Et il est vraiment doué pour ça."


Une politique de "tolérance zéro" sous l’ère Trump

Sous la première administration Trump, Tol Homan est nommé directeur intérimaire de l’ICE (il quitte ce poste en juin 2018). Pendant cette période, appliquant une politique de "tolérance zéro", il multiplie les arrestations d’immigrants sans papiers, allant jusqu’à cibler des lieux sensibles comme des écoles ou des tribunaux.


Des positions ultra-conservatrices

Tol Homan est connu pour son style intransigeant et ses positions ultra-conservatrices. En 2014, il avait par exemple affirmé que séparer les enfants de leurs parents serait un moyen efficace de décourager les passages illégaux de la frontière.

Lorsqu’il est apparu à la Convention nationale républicaine en juillet 2023, Tol Homan a déclaré à ses partisans : "J’ai un message pour les millions d’immigrants illégaux que Joe Biden a autorisé dans notre pays : vous feriez mieux de commencer à faire vos valises maintenant".


Un contributeur du "Projet 2025"

En 2022, selon CNN, Tol Homan contribue à l’élaboration du "Projet 2025", un ensemble de propositions politiques de 900 pages rédigé par la Heritage Foundation, un think-tank privé d’extrême-droite. L’objectif de ses auteurs : durcir encore davantage la politique migratoire américaine en cas de retour de l’administration Trump en 2024.

Toujours selon CNN, pour avoir exprimé sa volonté de mener les plus vastes campagnes de déportation que le pays ait connues, Tom Homan ferait partie des acteurs clés de cette initiative.







lundi 11 novembre 2024

(FR) Le meilleur moyen pour l’OTAN de réduire sa dépendance à l’égard des États-Unis.

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Soldats lettons brandissant les drapeaux de la Lettonie et de l'OTAN, Riga, Lettonie, mars 2024.
(
Ints Kalnins / Reuters)

Réduire la dépendance à l’égard des États-Unis se traduira par une alliance plus forte et une Europe plus sûre.

Dans leur article « Planning for a Post-American NATO », Phillips O'Brien et Edward Stringer tentent de remédier au vide sécuritaire qu'ils prévoient de voir apparaître à la suite de l'administration Trump 2.0. Ils ont particulièrement souligné ma proposition d’une « OTAN en hibernation », dans laquelle j’ai esquissé un cadre qui verrait les États-Unis retirer leurs forces terrestres d’Europe pour transférer la charge de la défense du continent de Washington aux gouvernements régionaux. Selon O'Brien et Stringer, une OTAN endormie pourrait rapidement devenir une OTAN morte, car l'alliance aura du mal à survivre à moins que les États-Unis ne démontrent clairement un engagement fort envers l'Europe. Sans cet engagement, affirment les auteurs, les anciennes divisions reviendront, l’Europe centrale et orientale devenant plus belliciste, tandis que l’Europe du Nord et l’Ouest continueront de bénéficier des cadeaux de Washington. « Une alliance européenne de sécurité pourrait s’effondrer sous le poids de points de vue aussi incompatibles », écrivent-ils.

O'Brien et Stringer ont mal évalué ma proposition. Une hibernation de l’OTAN n’est pas un retrait dévastateur de l’Europe. Au lieu de cela, elle repose sur trois hypothèses correctes : que les forces structurelles pousseront les États-Unis à donner la priorité à l'Asie plutôt qu'à l'Europe, que la poursuite de l'expansion de l'OTAN diluera les intérêts géographiques fondamentaux de l'OTAN et transformera une alliance défensive en une alliance idéologique, et que l'Europe de l'Ouest profitera de ses intérêts géographiques. était le résultat de la présence écrasante de l’Amérique. Dans mon système, l’Amérique continuera à soutenir la sécurité du vieux continent en fournissant son parapluie nucléaire et en déployant ses ressources navales. La proposition n’a jamais appelé à un retrait complet. Ce qu’il réclamait, c’était une répartition meilleure et plus équitable du travail, Washington transférant le fardeau de la logistique, des blindés et de l’infanterie aux riches puissances d’Europe occidentale.

Mais plus important encore, O'Brien et Stringer se trompent sur la sécurité européenne en général. Les auteurs soutiennent que l’OTAN peut survivre au retrait américain si l’organisation réforme sa direction et se regroupe. Plus précisément, ils soutiennent que le continent devrait transférer le commandement militaire de l’OTAN à un pays d’Europe de l’Est, comme la Pologne, et développer une dissuasion nucléaire commune. Mais leurs propositions ignorent le problème central qu’elles posent : l’incohérence stratégique de l’Europe. Ils n’acceptent pas que les « perspectives incompatibles » du continent ne soient pas le produit d’une mauvaise conception, mais le résultat de la géographie, de la culture, de la perception des menaces, des capacités d’attaque, de la puissance industrielle et d’une foule d’autres variables. Ces différences sont inconciliables. Il ne peut y avoir d’alliance de sécurité européenne unifiée sans Washington, car il n’y a tout simplement jamais eu d’Europe unifiée.

L’Europe est plutôt une entité artificielle, composée de pays aux intérêts très différents. Il est logique, par exemple, que l'Allemagne et les Pays-Bas s'investissent moins dans l'aide à l'Ukraine que l'Estonie ou la Pologne, car les priorités de défense de chacun de ces pays dépendent de leur distance géographique par rapport à la Russie – l'Allemagne et les Pays-Bas sont beaucoup plus éloignés de la Russie que l'Estonie et Pologne. En revanche, l’architecture de sécurité commune de l’Europe n’est pas naturelle. Il a été soutenu par l’hégémonie américaine, qui a poussé les puissances traditionnelles européennes à dépenser moins pour leurs armées que d’habitude, tout en réprimant la violence nationaliste traditionnelle sur le continent. Par conséquent, imaginer l’unité européenne sans l’Amérique – comme tentent de le faire les deux auteurs ci-dessus – est absurde.


STRUCTURE SOCIALE

O'Brien et Stringer ont tenté d'aborder, de manière pragmatique, les difficiles questions de sécurité auxquelles l'Europe serait confrontée si elle était abandonnée par Washington. Ils ont pesé les ressources et les idéologies des plus grandes nations du continent, afin de déterminer quelle nation pourrait être le meilleur leader. En fin de compte, ils sont arrivés à la conclusion que la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne étaient incapables de diriger le continent – ​​mais que la Pologne le pouvait, grâce à son récent réarmement. Ils soutiennent également que l’Europe devra envisager de mettre en place une dissuasion nucléaire à l’échelle du continent. Dans un avenir proche, ils suggèrent que Londres et Paris pourraient fournir un tel bouclier en accordant à d’autres pays européens certains droits sur leurs protocoles de lancement d’armes. À long terme, ils soutiennent que le continent devrait créer un arsenal nucléaire commun.

Ces idées pourraient donner lieu à un bon débat académique, mais elles ne sont pas pratiques. Examinons d'abord la question nucléaire. L’idée selon laquelle la France ou la Grande-Bretagne permettraient à un autre pays – sans parler de certains responsables non élus de l’Union européenne – de déterminer leur posture nucléaire est fantaisiste. L’idée selon laquelle les pays européens se coordonneraient pour développer un arsenal nucléaire commun est tout aussi fantaisiste.

De même, l’affirmation des auteurs selon laquelle la France, l’Allemagne et la Grande-Bretagne seraient d’accord sur une orientation de politique étrangère unifiée est invraisemblable : la paix des grandes puissances en Europe est un état de paix internationale relative considéré comme supervisé par les États-Unis ou le Royaume-Uni (Pax Americana) en grande majorité, et non pas parce que leurs les pays sont soudainement devenus bienveillants. Même si les plus grandes puissances européennes deviennent désormais plus dociles, il est peu probable que les trois pays les plus peuplés du continent abandonnent leurs intérêts économiques et stratégiques concurrents et acceptent de céder le leadership à un pays d’Europe de l’Est agressif et paranoïaque, qui est financièrement ou matériellement bien pire. que n’importe lequel des trois pays.

O'Brien et Stringer semblent avoir mal compris l'histoire européenne. La mission de l'OTAN au cours des 70 dernières années a été non seulement de défendre l'Europe, mais aussi de contenir les explosions nationalistes en Europe qui ont contribué aux deux guerres mondiales, en partie pour qu'aucun pays ne puisse dominer les autres. La seule façon raisonnable pour l’Europe de réaliser ce que suggèrent les deux auteurs est de transformer l’Union européenne en un empire supranational, avec toutes les répressions qui découlent de la création d’une telle entité. En centralisant l’Europe d’un bloc commercial fédéral à un État impérial à part entière, les décideurs politiques encourageraient et promouvraient naturellement les forces sociales centrifuges. Ces forces, à leur tour, déclencheront un cycle de répression politique et économique et d’érosion des droits démocratiques – comme cela s’est produit dans le passé.


LE MEILLEUR DES DEUX MONDES

Heureusement, il existe une option intermédiaire pour une nouvelle architecture stratégique européenne, une option qui évite un retrait complet des États-Unis mais qui n’impose pas à Washington un fardeau au point de le mettre en faillite. Au lieu d’essayer de sécuriser un continent largement en paix et suffisamment riche pour financer sa propre défense, les États-Unis pourraient servir de force d’équilibrage offshore. Washington n’aspirera plus à la suprématie sur le champ de bataille européen. Au lieu de cela, ils permettraient à l’Europe de se réarmer et de partager ensuite le fardeau avec l’Europe. Ils retireront leurs troupes et leurs équipements d’Europe et permettront aux pays d’Europe occidentale de revenir à leur posture de force d’avant 1990. Toutefois, les États-Unis continueront de fournir un parapluie nucléaire global aux membres de l’OTAN et d’empêcher la prolifération nucléaire sur le continent. Objectif américain depuis plus d'un demi-siècle. Sa puissante Deuxième Flotte protégera les voies maritimes, soutiendra les principales puissances navales du continent et continuera à assurer une dissuasion étendue – contribuant ainsi à satisfaire les Européens craintifs et abandonnés au moment de la revanche de la Russie.

Contrairement à l'approche d'O'Brien et Stringer, cette approche est ancrée dans la réalité. Il reconnaît que tous les pays ne sont pas confrontés aux mêmes menaces et que si une hégémonie lointaine offre une sécurité totale, la possibilité de libre arbitre apparaît accrue parmi les pays éloignés de leur principale puissance rivale. De plus, plus la coalition est grande, plus ses membres deviennent égaux, quelles que soient leur taille et leurs contributions, ce qui entraîne une diminution du pouvoir relatif du principal défenseur. Rien de tout cela n’est bénéfique pour Washington.

Une OTAN endormie aiderait à résoudre ces dilemmes. Il maintenait l’Amérique liée au continent, contrôlait la prolifération nucléaire et contenait les impulsions nationalistes et impérialistes parmi les puissances européennes. Cela freine également le populisme des deux côtés de l’Atlantique en rendant les dépenses de défense plus équitables et en assurant la sécurité des nations européennes qui, fondamentalement, ne peuvent pas se faire confiance, pour des raisons historiques. Mais cela oblige l’Europe occidentale à faire davantage pour protéger le continent qu’elle ne le fait aujourd’hui. La simple vérité est que la France, l’Allemagne et d’autres pays d’Europe occidentale n’investiront jamais sérieusement dans leurs forces armées tant qu’ils pourront compter sur la protection américaine. Washington doit se retirer partiellement avant que ces pays puissent mieux se coordonner avec l’Europe centrale et orientale.

Les Européens se plaindront certainement du retrait partiel des États-Unis. Mais en fin de compte, une OTAN en sommeil profiterait à tous ses membres. Si l’Europe partageait mieux le fardeau de la logistique, des blindés, du renseignement et des troupes terrestres, il serait plus facile pour les États-Unis d’assurer la paix et d’unifier l’Europe grâce à leur écrasante puissance nucléaire et navale. Et l’OTAN finira par devenir fermée, minimaliste et défensive – exactement comme ses fondateurs l’avaient initialement prévu.


Sumantra Maitra est membre de la Royal Historical Society et auteur de « The Sources of Russian Aggression » (Les sources de l'agression russe).


Source : Sumantra Maitra, « The Best NATO Is a Dormant NATO », Foreign Affairs, 11/04/2024.











mercredi 6 novembre 2024

(FR) Élections américaines 2024 : Donald Trump revendique la victoire à la présidentielle américaine.

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Donald Trump a revendiqué sa victoire à l’élection présidentielle américaine lors de sa première prise de parole ce mercredi 6 novembre 2024 au Palm Beach County Convention Center à West Palm Beach, en Floride . « Merci à tous », ont été ses premiers mots une fois arrivé au pupitre. Il a remercié chaleureusement ses soutiens, soulignant l'ampleur et l'unicité de son mouvement politique, qu'il qualifie de "plus grand mouvement politique" du pays, capable de guérir les blessures de l'Amérique et de répondre aux défis, notamment les questions frontalières. Il a réaffirmé dans ce sens son engagement à rendre les États-Unis prospères, envisageant son mandat comme un "âge d'or" pour le pays, avec des priorités sur la sécurité, l’économie, et l’éducation.

Il a célébré à cet effet ses victoires électorales, notamment dans des Etats clés et au Sénat, soulignant le soutien massif qu’il a reçu du peuple américain, et fait part de sa gratitude envers son équipe, sa famille et notamment Elon Musk pour son soutien technologique, essentiel durant des crises comme celle en Caroline du Nord.




Donald Trump a rappelé vouloir fortifier les frontières, encourager une immigration légale, et il évoque le développement des ressources énergétiques domestiques pour assurer l'indépendance économique du pays. Rappelant l’unité nationale en tant que fondement de son programme, il appelle ses concitoyens à dépasser les divisions passées et à travailler ensemble pour un avenir meilleur et plus fort pour l'Amérique, concluant avec une prière pour la nation.


Élections américaines 2024 : Le collège électoral et ses Swing States







lundi 4 novembre 2024

(FR) Élections américaines de dernière minute : le poids retombe sur l’État du champ de bataille, la Pennsylvanie

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M. Trump sera-t-il réélu ou Mme Harris deviendra-t-elle la première femme présidente des États-Unis ? -Photo : Bloomberg

La course à la Maison Blanche en 2024 est très intense, alors que l'issue peut être déterminée par des dizaines de milliers de votes exprimés dans certains États clés du champ de bataille.

Le vainqueur de l'élection présidentielle américaine du 5 novembre 2024 dirigera un pays de plus de 330 millions d'habitants, mais la course sera presque certainement décidée par des dizaines de milliers d'électeurs - une petite fraction de la population - dans certains États clés.

Reuters a déclaré que seuls 7 États sur 50 seraient réellement compétitifs en 2024, le reste montrant déjà des signes de tendance démocrate ou républicaine. Parmi ces 7 swing states, la Pennsylvanie est considérée comme l’État le plus important, capable de déterminer le prochain locataire de la Maison Blanche pour 4 ans.

Les stratégies des candidats ont reflété cette réalité, puisque la majorité des dépenses publicitaires et des événements de campagne de M. Donald Trump et de Mme Kamala Harris sont dirigées vers 7 États du champ de bataille.


Pourquoi le président américain n’est-il pas élu au suffrage populaire ?

Lorsqu'ils votent en novembre, les Américains ne votent pas directement pour les candidats mais choisissent uniquement des grands électeurs dans lequel ils vivent. Chaque État se voit attribuer un certain nombre d'électeurs en fonction de sa population. Ensuite, ces électeurs votent officiellement pour le président.

Pour gagner, un candidat a besoin d'au moins 270/538 des suffrages des grands électeurs.




Un candidat peut remporter plus de votes populaires mais perdre quand même en perdant le vote électoral. En 2020, Donald Trump a perdu le vote populaire d'environ 3 millions de voix, mais a quand même gagné contre Hillary Clinton grâce à davantage de votes électoraux.

En cas d'égalité 269-269, la Chambre des représentants des États-Unis choisira le président, chaque État représentant une voix. C’est dans ce scénario que les analystes estiment que M. Trump bénéficiera d’un avantage.

Si tous les États, à l’exception des États du champ de bataille, votent comme prévu, la vice-présidente Kamala Harris obtiendra 226 voix électorales et Donald Trump 219 voix, les 93 voix restantes étant incertaines.


Quels sont les états du champ de bataille ?

Les 7 États du champ de bataille en 2024 sont le Michigan, la Pennsylvanie, le Wisconsin, l’Arizona, la Géorgie, le Nevada et la Caroline du Nord.

Le Michigan, la Pennsylvanie et le Wisconsin sont par nature des « murs bleus », votant systématiquement pour les candidats démocrates. Cependant, en 2016, Donald Trump a remporté les trois États – un facteur qui a alimenté sa victoire inattendue sur la candidate Hillary Clinton.

Quatre ans plus tard, M. Joe Biden devient locataire de la Maison Blanche en reconquérant le Michigan, le Wisconsin et la Pennsylvanie, et enregistre également un tournant en Géorgie et en Arizona, deux États qui votaient auparavant pour le Parti républicain.


Les résultats sont-ils proches ?

Au 3 novembre, selon l' outil de suivi des sondages publics du New York Times, les 7 États du champ de bataille étaient en équilibre. M. Trump mène de 3 points de pourcentage en Arizona tandis que dans les 6 États restants, les deux candidats ne sont séparés en moyenne que d'un point.

La course de 2024 semble être encore plus intense que celle de 2020. En 2020, seulement 43 000 voix dans 3 États passant de M. Biden à M. Trump ont suffi pour que l’ancien président soit réélu.


Pourquoi la Pennsylvanie est-elle importante ?

La Pennsylvanie dispose de 19 voix électorales, ce qui la place au premier rang des États du champ de bataille.

Si elle perd en Pennsylvanie, Mme Harris aura besoin de la Caroline du Nord ou de la Géorgie – deux États qui ont voté pour le Parti démocrate à trois reprises au cours des quatre dernières décennies – pour se rapprocher de la victoire. 

Pendant ce temps, si M. Trump perd en Pennsylvanie, l’ancien président aura besoin du Wisconsin ou du Michigan, qui n’ont voté pour le Parti républicain qu’une seule fois en 2020 depuis les années 1980.

Les deux campagnes considèrent la Pennsylvanie comme un État prioritaire, Mme Harris et M. Trump y passant le plus de temps. Au 7 octobre, les campagnes et leurs alliés avaient dépensé 279,3 millions de dollars en publicité en Pennsylvanie, dépassant de loin le Michigan, deuxième avec 75 millions de dollars.


Pourquoi un comté du Nebraska attire l'attention

48 États américains appliquent le principe du « take all » (prendre tout), selon lequel le candidat obtenant le plus de voix obtiendra toutes les voix électorales de cet État. Cependant, le Nebraska et le Maine attribuent les votes électoraux en fonction de la circonscription du Congrès de chaque État. En 2020, M. Biden possède l'une des 5 voix électorales du Nebraska, et M. Trump possède l'une des 4 voix électorales du Maine.

Un vote électoral dans le 2e district du Nebraska, concentré à Omaha, est considéré comme âprement contesté. Certains analystes indépendants estiment que ce vote pourrait appartenir à Mme Harris. Les deux partis ont dépensé des millions de dollars pour diffuser de la publicité rien qu’à Omaha.

Ce vote est très important. Si Mme Harris remporte le Michigan, la Pennsylvanie et le Wisconsin, tandis que M. Trump remporte les quatre États restants du champ de bataille, alors le 2e district du Nebraska décidera si les résultats des élections sont à égalité ou si Mme Harris l'emporte.







dimanche 3 novembre 2024

(FR) Kamala Harris : Profil d'un personnage qui pourrait devenir une femme présidente des États-Unis.

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(Reuters)

Moins d'une heure après que le président Joe Biden se soit retiré de la course à la Maison Blanche en 2024, le Parti démocrate s'est rallié à son adjointe Kamala Harris en tant que nouvelle candidate du parti à la présidentielle.

Alors que la vice-présidente américaine Kamala Harris espère devenir la première femme à occuper les plus hautes fonctions du pays, sa campagne dynamise les électeurs libéraux et a permis de récolter un montant record de 671 millions de dollars au cours des deux mois qui ont suivi sa nomination par le Parti démocrate, soit près de trois fois plus que son adversaire républicain Donald Trump.

Mais le parcours de Mme Harris pour remporter la présidence est un parcours unique, ardu et plein de questions difficiles.

Ce qui suit contient des informations sur la vie et la carrière de Mme Harris, les événements qui ont façonné sa vie et comment la vice-présidente américaine est devenue la première femme noire candidate à la présidentielle.


Comment Mme Harris est-elle devenue vice-présidente ?

Mme Harris s'est présentée pour la première fois à la présidence il y a cinq ans.

Elle a débuté sa carrière au bureau du procureur du comté d'Alameda et est devenue procureure de district - le principal procureur du pays - puis de la ville de San Francisco de 2004 à 2011.

La promotion suivante de Mme Harris a été au poste de procureur général de Californie, devenant ainsi la première femme et la première personne noire élue au poste de plus haut responsable de l'application des lois dans cet État le plus peuplé des États-Unis.




Mme Harris a tenu une conférence de presse à San Francisco en 2005, alors qu'elle était encore procureure du district d'Alameda. (Chronique de San Francisco/Getty Images)

Elle a profité de cet élan pour remporter l’élection de sénatrice américaine de Californie en 2016, poste pour lequel elle a attiré l’attention pour son style de procureur lors des auditions de la commission.

Mais son rêve de 2020 à la Maison Blanche, qui a commencé avec de grandes foules et de grands moments, s'est évaporé alors qu'elle a eu du mal à articuler ses programmes idéologiques et politiques.

Sa campagne a échoué après moins d’un an et c’est Joe Biden qui a ramené la femme de 60 ans sur le devant de la scène nationale en la nommant candidate à la vice-présidence.

Gil Duran, l'ancien directeur des communications de Mme Harris, a qualifié cela de "renversement de fortune majeur".

"Beaucoup de gens pensent que Mme Harris n'a pas la discipline et la concentration nécessaires pour gravir les échelons de la Maison Blanche aussi rapidement... même si tout le monde sait qu'elle a l'ambition et le potentiel pour devenir une star. Il est clair qu'elle a un talent naturel, ", a déclaré M. Duran.




M. Joe Biden et Mme Kamala Harris après que M. Biden a accepté la nomination présidentielle à la Convention nationale démocrate de 2020 (Reuters)

En tant que vice-présidente, Mme Harris s'est concentrée sur un certain nombre d'initiatives clés et elle a joué un rôle clé dans bon nombre des réalisations les plus remarquables de l'administration Biden.

Elle a établi un nouveau record de votes décisifs par un vice-président dans l’histoire du Sénat, en aidant à faire adopter le Plan de sauvetage américain de 2021 et la loi sur la désinflation, qui prévoyaient des paiements de relance pendant la période Covid et d’autres mesures de soutien.

M. Biden s’est également appuyé sur Mme Harris pour diriger les efforts visant à s’attaquer aux causes profondes du problème de l’immigration dans un contexte d’augmentation record du flux de migrants sans papiers à la frontière américano-mexicaine.

C'est une question sur laquelle les opposants ont souligné que Harris n'avait pas fait de progrès, et elle a été critiquée par les républicains et certains démocrates pour avoir mis six mois pour planifier son voyage à la frontière après son entrée en fonction.

Plus récemment, Mme Harris a représenté le gouvernement en soulignant les dommages causés par l'interdiction de l'avortement après que la Cour suprême a annulé l'arrêt Roe v. Wade en 2022. L’affaire Roe c. Wade est un précédent d’un demi-siècle qui garantit le droit à l’avortement.

La lutte pour le droit à l’avortement a occupé le devant de la scène lors de la convention démocrate d’août 2024, conformément à un message plus large : la liberté.

Dans son discours d’ouverture à la Convention nationale démocrate, le plus grand discours de sa carrière, Mme Harris a critiqué M. Trump et le Parti républicain pour avoir créé une opinion populaire infructueuse visant à limiter le droit à l’avortement dans tout le pays.

"En termes simples, ils ont perdu la tête", a déclaré Mme Harris, promettant de rétablir les protections fournies par l'arrêt Roe v. Wade tient ses promesses.



La vice-présidente Kamala Harris s'exprime à la Convention nationale démocrate à Chicago, Illinois, États-Unis, le 22 août 2024. (Getty Images)

Le vice-président cherche à se réintroduire auprès des électeurs, certains sondages montrant que beaucoup considèrent M. Trump comme plus proche du centre du spectre politique.

Lors de la course à la Maison Blanche en 2020, Mme Harris a mis l'accent sur les opinions de gauche sur l'immigration, les droits LGBT et d'autres questions, mais a été attaquée pour son passé de procureur.

Quatre ans plus tard, Mme Harris se présente comme une policière prête à sévir contre un criminel reconnu coupable comme M. Trump.

Mais elle a également promis de mettre en œuvre un programme progressiste pour améliorer la vie des familles de la classe moyenne comme la sienne.

"Tout au long de ma carrière, je n'ai eu qu'un seul client : le peuple américain", a déclaré Mme Harris.


Les antécédents de Mme Harris

Kamala Harris est née à Oakland, en Californie, dans une famille de parents immigrés : sa mère est indienne et son père est jamaïcain.

Ses parents ont divorcé quand elle avait cinq ans et Mme Harris et sa sœur cadette ont été élevées principalement par une mère célibataire hindoue, Shyamala Gopalan Harris. La mère de Mme Harris était chercheuse sur le cancer et militante des droits civiques.

La vice-présidente parle souvent des leçons que sa mère a transmises à ses filles.

"Ma mère était dure, courageuse, une pionnière dans la lutte pour la santé des femmes", a déclaré Mme Harris lors de la Convention nationale démocrate (DNC). "Elle nous a appris à ne jamais nous plaindre de l'injustice, mais à agir pour la changer."

Mme Harris a grandi en embrassant son héritage indien, visitant l'Inde avec sa mère, mais elle a également déclaré que sa mère l'avait assimilée, elle et sa jeune sœur Maya, à la culture noire de la ville d'Oakland.

"Ma mère comprenait très bien qu'elle élevait deux filles noires", a écrit Mme Harris dans son autobiographie, The Truths We Hold.

"Elle savait que la résidence secondaire qu'elle avait choisie nous verrait, Maya et moi, comme deux filles noires, et elle était déterminée à faire en sorte que nous devenions des femmes noires confiantes et fières."

Son origine métisse et son éducation pourraient aider Mme Harris à atteindre et à attirer facilement de nombreux Américains. De nombreuses régions du pays dont la démographie évolue rapidement – ​​suffisamment pour changer la politique d’une région – considèrent Mme Harris comme une icône ambitieuse.




Kamala Harris (couverture gauche) photographiée avec sa mère et sa sœur Maya lorsqu'elle était enfant. (Kamala Harris)

Mais c'est ses études à l'Université Howard à Washington, DC, l'un des principaux collèges et universités historiquement noirs d'Amérique, qui ont été l'une des expériences déterminantes de sa vie, a partagé le vice-président Kamala Harris.

Sa camarade de classe Lita Rosario-Richardson a rencontré Mme Harris lorsque les étudiants se sont réunis pour discuter de politique, de mode et de potins.

"J'ai trouvé que Harris avait un sens de l'argumentation très aiguisé", a-t-elle déclaré.

Elles se sont connectées sur leur capacité à débattre passionnément avec les républicains sur le campus, sur leurs expériences de croissance en tant que mères célibataires, et même sur le fait qu'elles étaient toutes les deux Balance (Signe du Zodiaque 23 septembre – 22 octobre). Ce fut aussi une période politiquement formatrice. 

"À l'époque où Ronald Reagan était président, c'était une époque de ségrégation et il y avait beaucoup de discussions sur la marginalisation des "Africains transgenres" et sur la question de la fête de Martin Luther King", a déclaré Mme Rosario-Richardson.

"Nous savons qu'en tant que descendants d'esclaves et de personnes de couleur ayant échappé à la domination coloniale, nous avons un rôle particulier à jouer et qu'être éduqué nous confère un statut particulier dans la société pour contribuer au changement", explique-t-elle – une philosophie et un appel à action qui faisait partie de l'expérience universitaire de Mme Harris.

Mais Mme Harris opère également facilement dans des communautés à prédominance blanche. Dans ses premières années, elle a vécu un certain temps au Canada. Lorsque sa mère Gopalan Harris a accepté un poste d'enseignante à l'Université McGill, Mme Kamala et sa sœur cadette Maya l'ont accompagnée et ont étudié à Montréal pendant cinq ans.

La vice-présidente a déclaré qu'elle s'était toujours sentie à l'aise avec son identité et s'est simplement décrite comme une "Américaine".

S'adressant au Washington Post en 2019, Mme Harris a déclaré que les politiciens ne devraient pas avoir à essayer de s'intégrer à un certain groupe simplement en raison de leur couleur de peau ou de leurs origines.

"Je veux dire : je suis qui je suis. Je suis d'accord avec ça. Vous devrez peut-être le découvrir, mais je suis d'accord avec ça", a-t-elle déclaré.



Vêtue d'un costume sombre, Kamala Harris embrasse son mari Doug Emhoff lors de la Convention démocrate de 2024 à Chicago. (Getty Images)

Kamala, un « club de débat » plein d'esprit

Dès ses débuts, comme son amie Rosario-Richardson l'a démontré, Mme Harris a démontré les compétences qui ont fait d'elle l'une des rares femmes à briser les barrières.

"C'est ce qui m'a incité à lui demander de rejoindre l'équipe de débat [à l'Université Howard], son intrépidité", a déclaré Mme Rosario-Richardson.

L'intelligence et l'humour sont également de la partie. Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux en 2020 après avoir remporté les élections, Mme Harris a partagé la bonne nouvelle de sa victoire – accompagnée d'un rire chaleureux – avec Joe Biden : "Nous l'avons fait, nous l'avons fait Joe. Vous serez l'Amérique. prochain président!"

Le rire que Mme Harris a partagé avec le président élu de l'époque, lors de son premier appel important, a été un rire que son amie a immédiatement reconnu et profondément ressenti.

"Elle a toujours eu ce rire, elle a toujours eu le sens de l'humour, elle a eu l'intelligence - même dans le contexte d'un débat universitaire - pour faire passer des messages."




Mme Kamala Harris : de procureure à potentielle présidente.

Kamala, « Momala », la créatrice d'histoire

En 2014, Mme Harris, alors procureure générale de Californie, a épousé l'avocat Doug Emhoff et est devenue la belle-mère des deux enfants de son mari, Cole et Ella.




Doug Emhoff avec sa seconde épouse Kamala Harris et ses enfants Cole et Ella, jour de la fête des Pères 2024.

Dans un article du magazine Elle en 2019, Mme Harris a parlé de son expérience de devenir belle-mère et a révélé son nom, qui a ensuite fait la une de la presse.

"Quand Doug et moi nous sommes mariés, Cole, Ella et moi avons convenu que nous n'aimions pas le terme 'belle-mère'. Au lieu de cela, ils ont trouvé le nom 'Momala'."

Avec leur père, Cole et Ella sont apparus à la Convention nationale démocrate de 2024, montant sur scène pour honorer Harris et ce qu'ils ont appelé leur "grande et merveilleuse famille".

Sa sœur Maya, sa nièce Meena et - peut-être le plus mémorable - ses deux nièces et neveux sont également apparues à Chicago.

Beaucoup de gens pensent que Mme Harris devrait également être considérée et reconnue comme la descendante d’une autre famille, c’est-à-dire l’héritière de nombreuses générations de militantes noires.

Nadia Brown, professeure agrégée de sciences politiques et d'études afro-américaines à l'Université Purdue, a déclaré à la BBC que Mme Harris suivait les traces des militantes Fannie Lou Hamer, Ella Baker et Septima Clark, entre autres.

"Elle est l'héritière d'un héritage d'organisateurs locaux, d'élus et de candidats malheureux qui ont ouvert la voie à la Maison Blanche."


Source https://www.bbc.com/vietnamese/articles/cx2yv5vxjlvo



lundi 28 octobre 2024

(FR) Sommet des BRICS 2024 : La plateforme clé pour promouvoir un "ordre mondial multipolaire"

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Le Premier ministre indien Narendra Modi, le président russe Vladimir Poutine et le président chinois Xi Jinping. MAXPPP - ALEXANDER ZEMLIANICHENKO / POOL


Les BRICS+ sont un groupe de neuf pays qui se réunissent en sommets annuels : le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine, l’Afrique du Sud, l’Iran, l’Égypte, les Émirats arabes unis et l’Éthiopie.

Initialement, le terme « BRIC » est un acronyme pour désigner quatre pays se regroupant à partir de 2009 : Brésil, Russie, Inde et Chine (en anglais : Brazil, Russia, India, China) ; le terme BRIC est forgé dès 2001 par un économiste de Goldman Sachs. En 2011, l'adhésion de l'Afrique du Sud (en anglais : South Africa) donne naissance à l'acronyme BRICS. En 2024, avec l'ajout de l'Égypte, des Émirats arabes unis, de l'Éthiopie, de l'Iran, le groupe devient les BRICS+.

Les neuf pays des BRICS+ représentent en 2024 près de la moitié de la population mondiale et 26 % du produit intérieur brut mondial en valeur nominale, contre 44 % pour les pays du G7.

Le sommet des BRICS 2024 est le 16e sommet des BRICS qui se tient du 22 au 24 octobre 2024 à Kazan en Russie.

Le sommet des BRICS Plus, qui se tient à Kazan en Russie, marque un tournant avec l'intégration de nouveaux membres, dont l'Égypte et l'Éthiopie. Ce sommet aborde des enjeux clés comme l'alternative au dollar et un éventuel nouvel élargissement. Ce sommet a été présenté comme un événement diplomatique majeur, marquant une tentative de Vladimir Poutine de démontrer que la Russie n'est pas isolée sur la scène internationale malgré l'invasion de l'Ukraine. Vladimir Poutine a réitéré son ambition de remodeler l'ordre géopolitique mondial, en utilisant le bloc BRICS comme levier face à l'hégémonie occidentale, notamment celle des États-Unis et de l'Europe.



En marge du sommet, il a rencontré son homologue sud-africain Cyril Ramaphosa, marquant ainsi la solidité de l'alliance entre la Russie et l'Afrique du Sud. Cette relation, qualifiée de "précieuse" par Ramaphosa, remonte à l'époque de la lutte contre l'apartheid, où Moscou avait soutenu les mouvements de libération sud-africains. Désormais, cette amitié historique s'inscrit dans une dynamique plus large visant à renforcer la coopération économique, géopolitique et sécuritaire.

Poutine, confronté à une mise au ban progressive de la Russie par les puissances occidentales depuis l'invasion de l'Ukraine, voit dans les BRICS une plateforme clé pour promouvoir un "ordre mondial multipolaire" . Cette vision se traduit par des efforts concertés avec l'Afrique du Sud pour défier la domination du dollar, et plus largement, pour promouvoir un système financier et politique moins centré sur l'Occident. L'année précédente, la Russie avait mené des exercices militaires conjoints avec l'Afrique du Sud et la Chine, provoquant l'inquiétude des pays occidentaux. Cette collaboration souligne la volonté de Moscou de s'appuyer sur le Sud global, notamment l'Afrique, pour maintenir une influence stratégique malgré l'isolement international croissant. Pour la Russie, c'est l'occasion d'affirmer sa place au sein d'une alliance qui représente près de 50 % de la population mondiale et plus de 30 % du PIB global.






Ce sommet permet aussi à Poutine de redorer son image sur la scène internationale, en particulier avec la visite du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, une rencontre qui suscite des interrogations, notamment en raison du mandat d'arrêt qui pèse sur le président russe et de son isolement diplomatique. Cependant, la Russie tente de faire passer ce rassemblement comme un signe d'un nouvel ordre mondial, plus juste et moins centré sur les États-Unis.

Les BRICS s'accordent sur un objectif majeur : réduire la dépendance au dollar américain dans leurs échanges économiques. Bien que l'idée d'une monnaie commune ait été évoquée lors du sommet de Johannesburg en 2023, elle semble encore prématurée en raison des divergences économiques entre les membres. La Russie, par exemple, souhaiterait la mise en place d'une plateforme alternative pour les paiements internationaux après son exclusion du système SWIFT, mais la Chine se montre réticente, soucieuse de ne pas subir les effets des sanctions imposées à Moscou. Cette volonté de dédollarisation vise à affaiblir l'influence économique des États-Unis et à proposer un nouvel ordre monétaire international.




Lors du sommet des BRICS en 2023 à Johannesburg, l'idée d'une monnaie commune a été abordée comme une solution potentielle pour renforcer l'intégration économique entre les membres et limiter l'hégémonie du dollar. Cependant, les différences économiques significatives entre les membres, notamment entre la Chine et la Russie, compliquent la création d'une telle monnaie, surtout en raison des tensions géopolitiques et des sanctions internationales qui affectent certains pays comme la Russie. En outre, la Chine, bien que favorable à une réduction de la dépendance au dollar, reste prudente quant à l'adoption d'une monnaie unique, préférant miser sur la promotion de sa propre monnaie, le yuan, dans les échanges internationaux.




Toutefois, ces ambitions se heurtent aux intérêts divergents des membres, certains préférant maintenir leurs liens avec l'Occident, notamment l'Inde et le Brésil, tandis que d'autres, comme l'Iran et la Russie, cherchent à s'en éloigner. Pour Vladimir Poutine, ce sommet est aussi l'occasion de s'affirmer politiquement, en utilisant la tribune offerte pour légitimer sa guerre en Ukraine et promouvoir une vision multipolaire du monde, où l'Occident perdrait sa domination historique.

L'élargissement du groupe à l'Iran, l'Égypte, l'Éthiopie et les Émirats arabes unis a été interprété comme un signe de son influence croissante, tandis que le renforcement des liens avec la Chine a été présenté comme un facteur de stabilité mondiale. L'arrivée des nouveaux membres africains, comme l'Éthiopie, renforce le poids démographique et géopolitique du bloc, bien que des tensions existent. Les experts restent divisés sur la signification réelle de ce sommet. Certains considèrent que le sommet des BRICS est une victoire diplomatique pour Poutine, démontrant l'échec des sanctions occidentales et la montée en puissance d'un bloc anti-occidental. D'autres, cependant, soulignent l'hétérogénéité du groupe, les divergences d'intérêts entre ses membres et la difficulté de créer un véritable bloc uni, notamment entre l'Égypte et l'Éthiopie concernant le barrage de la Renaissance. La Chine, bien que considérée comme le leader du groupe, a des intérêts économiques et géopolitiques distincts de ceux de la Russie, et son soutien à la Russie dans le conflit ukrainien est loin d'être inconditionnel. De plus, l'absence du Brésil, représenté uniquement par visioconférence, et la présence de pays comme l'Iran et l'Éthiopie, qui ne sont pas des modèles de démocratie, soulèvent des questions sur la cohésion idéologique du groupe. L'avenir des BRICS reste incertain, certains experts prédisant une institutionnalisation accrue, tandis que d'autres estiment que le groupe conservera sa flexibilité et son caractère informel. Carlos Lopez, professeur à l'université du Cap, a évoqué l'importance de ces nouveaux membres pour le BRICS tout en soulignant les défis à venir.



vendredi 25 octobre 2024

(FR) Les véritables dangers des projets économiques de Donald Trump.

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L'ancien président Donald Trump s'exprimant lors d'un événement de campagne à Reading, en Pennsylvanie, en octobre 2024 (Jeenah Moon / Reuters).

Le programme radical de Donald Trump aurait un effet dévastateur sur les entreprises, les travailleurs et les consommateurs américains.

De nombreux observateurs avertis et une partie importante de l’électorat américain sont calmes, voire enthousiasmés, quant au programme économique que Donald Trump poursuivra au cours de son deuxième mandat de président. Certains se sont concentrés sur sa promesse d’étendre les réductions d’impôts et la déréglementation, suggérant la poursuite des précédentes politiques républicaines. D’autres citent la faible inflation et les rendements boursiers élevés qui ont caractérisé son premier mandat avant le début de la pandémie de COVID-19 et soutiennent que les politiques de Trump – y compris son approche peu orthodoxe en matière de droits de douane et d’immigration – ont été efficaces, ou du moins inoffensives.

De nombreux investisseurs et initiés affirment que les menaces les plus extrêmes de Trump – concernant les expulsions, le commerce, la Chine et la Réserve fédérale – sont en réalité des stratégies judicieuses pour aider à gagner contre les acteurs étrangers, les technocrates nationaux ou la majorité démocrate à la Chambre des représentants. Et l’on est généralement convaincu que si l’une des politiques économiques agressives de Trump impose de lourds coûts, en particulier aux investisseurs ou aux grandes entreprises, il les annulera.

Cependant, ce sentiment de confiance vient d’une incapacité à comprendre le réel danger que représentent les projets économiques actuels de Donald Trump. Aucun président américain n’a jamais abandonné les priorités économiques qu’il a déclarées à plusieurs reprises depuis son premier jour au pouvoir. Trump et son colistier J.D. Vance, ont proposé une série d'interventions radicales et à grande échelle dans l'économie américaine, y compris des droits de douane sur toutes les importations, à un niveau d'urgence 10 à 15 fois supérieur aux tarifs appliqués par Trump pendant son premier mandat. principalement sur les produits chinois ; expulser ou détenir entre un million et huit millions d’immigrants, dont certains se trouvent actuellement légalement aux États-Unis ; et une lutte de pouvoir impliquant l'utilisation du pouvoir exécutif pour confisquer les fonds affectés par le Congrès et interférer avec l'indépendance de la Réserve fédérale dans la fixation des taux d'intérêt. Ce sont des mesures bien pires que celles qu’il a appliquées au cours de son premier mandat.

La vision du monde qui a justifié ces politiques n’était pas sans rappeler celle qui a façonné les administrations Ronald Reagan et George W. Bush. Le point de vue de Trump est basé sur la philosophie de Hobbes (*), et non sur la philosophie de Hayek (**), et il considère l’économie mondiale comme un jeu dans lequel d’autres pays veulent simplement se débarrasser de l’Amérique – l’Amérique doit donc d’abord s’en débarrasser. Trump a souligné que le blocage de l’activité économique par les étrangers améliorerait considérablement la situation des Américains qu’il soutient. C’est la direction constante de toutes les politiques économiques qu’il a proposées.

(*) Thomas Hobbes défend donc la nécessité d'un pouvoir politique fort et contraignant, mais dont le but est de permettre le déploiement de la liberté individuelle dans le respect de la sécurité et de la paix. La pensée de ce philosophe est donc, dans son but, libérale, mais la forme de gouvernement proposée est autoritaire.

(**) Friedrich Hayek avait de nombreuses convictions en matière d'économie. Il faisait partie de l'École autrichienne d'économie et croyait au capitalisme de marché libre . Il croyait également que le libre marché permettait la créativité, l'innovation et l'entrepreneuriat, qui sont nécessaires à l'épanouissement des sociétés et à la prospérité des citoyens.

Une telle approche pourrait être bénéfique dans les secteurs de l’immobilier et de la vente en ligne. Mais une économie nationale n’est pas simplement la somme de nombreux accords différents conclus par les gouvernements, même dans le cadre de négociations commerciales internationales. Une administration qui ne reconnaît pas cette différence et tente de maximiser les transactions ponctuelles réduira l'attractivité du pays pour les investissements à long terme.

Au cours des 50 dernières années, les programmes économiques des administrations présidentielles des deux partis, malgré leurs nombreuses différences, ont reconnu l’importance de renforcer la stabilité macroéconomique globale. Les présidents ont soutenu la réglementation gouvernementale et les dépenses publiques à des degrés divers, mais ils se sont généralement engagés à réduire l’instabilité à long terme. D’autres gouvernements à travers le monde ont cherché à suivre l’exemple américain à cet égard, pour leur bénéfice à long terme.

L’approche de Trump, en revanche, militarise l’instabilité. Mais l’instabilité est une arme difficile à contrôler, et elle se retournera contre quiconque en abusera.


LES DEUX PARTIES PERDENT

Selon Trump, l’expulsion d’un grand nombre de travailleurs sans papiers ; imposer des droits de douane élevés sur la plupart, sinon la totalité, des produits étrangers ; et un pouvoir discrétionnaire accru du président sur les politiques fiscales et monétaires qui apporteront la prospérité aux travailleurs américains. En fait, toutes ces mesures produiront le résultat inverse. En limitant l’offre de produits que les entreprises, les travailleurs et les ménages américains apprécient et utilisent, ils réduisent la productivité de l’économie américaine.

Ces mesures rendront également les activités commerciales plus coûteuses et plus incertaines. Contraintes de se débrouiller seules sans accès stable aux approvisionnements et aux marchés, de nombreuses entreprises choisiront d’opérer à plus petite échelle. Et le secteur commercial américain pourrait séparer les ventes et la production destinées au reste du monde du marché nord-américain, réduisant ainsi le retour sur investissement privé dans l’économie américaine et ralentissant la croissance des revenus, ce qui est une réalité pour tout le monde.




La United States Border Patrol entasse les immigrants mexicains dans des camions pour les transporter à la frontière en vue de leur expulsion pendant l'Opération Wetback.

Considérez la perspective d’une déportation massive. S’il est mis en œuvre comme le proposent Trump et ses substituts, cela signifierait qu’au moins 1,3 million de personnes seraient expulsées, dont la majorité travaille dans l’économie américaine. Cette politique est soutenue par de nombreux groupes d'électeurs et relève du pouvoir décisionnel légal du président. Il existe également un précédent historique avec l’Opération Wetback, le programme de l’administration Dwight D. Eisenhower qui a expulsé plus d’un million de personnes sur une période de 18 mois, à une époque où la population américaine globale était considérablement plus petite.

L’impact économique du plan d’expulsion de Trump sera grave. L’élimination de centaines de milliers de travailleurs entraînera des pénuries de main-d’œuvre dans des secteurs et des emplacements spécifiques, ce qui entraînera à son tour une augmentation généralisée des prix à mesure que l’offre diminuera. Une étude récente du Peterson Institute for International Economics a révélé qu’un choc négatif d’une telle ampleur sur l’offre de main-d’œuvre entraînerait une stagnation de l’ensemble de l’économie, entraînant une hausse de l’inflation de 1,5 % et une diminution du PIB de plus de 3 % en seulement trois ans.

Ce choc sera encore plus fort dans les secteurs les plus dépendants de la main-d’œuvre clandestine – culture de fruits et légumes, services hôteliers, construction de logements, production minière, pour n’en citer que quelques-uns – les employeurs auront du mal à trouver des travailleurs légaux pour remplacer ceux qui ont été expulsés. Les travailleurs légaux bénéficient de salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail que ce que la plupart des migrants sans papiers peuvent prétendre, et ils n’accepteront pas facilement des emplois mal rémunérés. Dans ces circonstances, de nombreuses entreprises seront contraintes de réduire leurs coûts de main-d’œuvre grâce à l’automatisation.

Les expulsions massives nuiraient également à l’économie d’autres manières. Comme l’a souligné l’économiste Michael Clemens, l’immigration crée des emplois pour les citoyens et les résidents permanents légaux – à raison d’environ un emploi pour dix immigrants employés. Ce phénomène s'explique par le fait que les travailleurs immigrés et leurs familles sont également des consommateurs. Les expulser réduirait la demande pour tous les biens et services que ce groupe achète aux États-Unis – ainsi que la demande de main d’œuvre dans les secteurs concernés.

De plus, les travailleurs immigrés contribuent à élargir l’assiette fiscale, dans la mesure où les bénéfices et les dépenses qu’ils génèrent sont également imposés. Ils ont également tendance à être plus jeunes et craignent d’être expulsés, ce qui les rend moins susceptibles de profiter des aides gouvernementales. Les immigrants de première génération apportent également d’importantes contributions à l’économie en matière d’entrepreneuriat et d’innovation, contributions qui seraient perdues si l’Amérique n’accueillait plus les immigrants. En bref, le plan d’expulsion de Trump entraînera un ralentissement de la croissance (voire une récession), une inflation plus élevée, moins d’emplois pour les citoyens et les résidents permanents légaux, et moins d’innovation. Réduire intentionnellement la main d’œuvre d’un pays est un acte extrêmement autodestructeur.

Le plan tarifaire de Trump est tout aussi imprudent du côté de l’offre de l’économie. Il a proposé des droits de douane de 60 % sur les marchandises en provenance de Chine et entre 10 % et 50 % sur les marchandises provenant de partout ailleurs, affirmant que ces droits de douane seraient rentabilisés en stimulant l'activité économique locale et en créant de nouveaux emplois. Trump a affirmé que les revenus provenant de ces tarifs compenseraient également largement son projet d’extension des réductions d’impôts pour les entreprises et les particuliers à revenus élevés. En réalité, les coûts de ces tarifs généraux seront principalement répercutés sur les consommateurs, à travers des prix plus élevés ou des pénuries de certains produits importés. Si les entreprises américaines peuvent produire des substituts à certains produits importés, elles ne le feront que si elles peuvent pratiquer des prix inférieurs à ceux imposés par les droits de douane ; sinon, ils rateront l’opportunité de gagner de l’argent.

Le résultat sera de l’inflation, et cela affectera particulièrement les ménages à faible revenu, dont les budgets sont largement consacrés aux vêtements, aux jouets, à l’électronique, à l’énergie et aux importations alimentaires. Une étude récente du Peterson Institute a révélé que les tarifs coûteraient au ménage moyen au moins 2 600 dollars de plus par an, et d'autres études estiment que le coût serait le double de ce montant. Pour les entreprises qui dépendent de produits importés, la hausse des prix et le manque de produits de remplacement peuvent les conduire à la faillite. Une deuxième administration Trump répéterait donc essentiellement certains des effets de la rupture de la chaîne d’approvisionnement provoquée par la pandémie. Ces nouveaux tarifs différeront de ceux de la première administration Trump dans le sens où ils seront appliqués plus largement et à un taux 10 à 15 fois supérieur au taux précédemment imposé.

En termes de recettes fiscales, les tarifs douaniers ne peuvent remplacer une part significative des autres taxes fédérales, précisément parce que leur objectif est de forcer les consommateurs à modifier leur comportement d’achat. Si un gouvernement augmente les impôts sur un bien donné, les contribuables trouveront au fil du temps des substituts ou réduiront leur consommation de ce bien, et les recettes fiscales provenant de ce bien diminueront. Lorsque des entreprises font faillite parce que leurs coûts augmentent trop, cela réduit également les recettes fiscales. Le taux d'imposition global de 20 % de Trump générerait des recettes d'environ 1,0 à 1,5 % du PIB la première année et diminuerait à partir de là ; un taux d’imposition plus élevé rapporterait encore moins de recettes.


LA GESTION EST TROP LARGE

Parce que les réductions d’impôts coûtent cher et que les tarifs proposés ne généreraient pas beaucoup de revenus, le programme de Trump créerait un énorme déficit budgétaire fédéral. Des analystes non partisans de la Wharton School de l'Université de Pennsylvanie ont estimé que ces propositions augmenteraient le déficit de 3,5 à 5 000 milliards de dollars sur dix ans. (Les plans économiques vantés par l'opposant de Trump, la vice-présidente Kamala Harris, augmenteraient également le déficit, mais de moins d'un tiers de ce montant.) Une étude non partisane récente d'éminents spécialistes des finances publiques a montré que les réductions d'impôts de Trump en 2017 ont produit moins de croissance que avons-nous pensé – et donc bien moins de recettes fiscales que de pertes fiscales directes.

Actuellement, le déficit budgétaire fédéral américain s’élève à environ 7 % du PIB – un chiffre énorme à une époque où le pays connaît le plein emploi et n’est pas confronté à une crise financière, sanitaire ou militaire. Augmenter ce chiffre de 1,5 % ou plus chaque année obligerait le gouvernement à consacrer une part de plus en plus importante du budget fédéral au paiement des intérêts de la dette. De plus, comme Donald Trump a également proposé de nouvelles barrières pour décourager davantage les investissements de la Chine et d'autres pays dans l'économie américaine, y compris la possibilité de taxes sur les achats étrangers d'obligations d'État américaines, le Trésor américain aura également moins d'acheteurs pour financer le déficit budgétaire. Lorsque le Trésor émettra davantage d’obligations, mais aura moins d’acheteurs qualifiés, il devra payer des taux d’intérêt plus élevés pour toutes les vendre. Réduire l’offre d’épargne disponible à l’étranger, tout comme réduire l’offre de biens ou de main-d’œuvre, coûtera cher à l’Amérique.

Donald Trump a également déclaré qu’en tant que président, il utiliserait le pouvoir exécutif pour confisquer – c’est-à-dire refuser de dépenser – les fonds alloués par le Congrès, afin de réduire les dépenses publiques auxquelles son administration s’est opposée. Grâce à cette opération – qui menace essentiellement de paralyser le gouvernement – ​​Trump gagnera en influence dans les négociations budgétaires. Bien qu'affirmer son autorité de cette manière ait été jugé légal par les tribunaux fédéraux, cela nuirait encore davantage à la transparence et à la prévisibilité du processus budgétaire américain déjà fragile. Une mauvaise gouvernance financière amènera les investisseurs nationaux et étrangers à considérer la dette publique comme plus risquée et à exiger des taux d’intérêt plus élevés lorsqu’ils achèteront des obligations.

Donald Trump a également menacé de restreindre considérablement l’indépendance de la Réserve fédérale, un pilier essentiel de la stabilité de l’économie américaine. Grâce à sa capacité à fixer les taux d’intérêt sans tenir compte des pressions politiques à court terme, une FED (Réserve fédérale des États-Unis) indépendante peut freiner l’économie lorsque cela est nécessaire, comme elle l’a fait avec succès en 2022 et 2023, lorsqu’elle a augmenté les taux d’intérêt pour faire face à l’inflation post-pandémique. Une banque centrale capable de réagir de manière crédible aux pressions inflationnistes sans intervention du gouvernement est essentielle pour empêcher l’inflation de monter en flèche à mesure que les prix montent en flèche.

Trump peut exercer son influence en politisant les nominations à la FED, en remplaçant le président de la Fed par l'un de ses amis politiques ou en modifiant les règles qui régissent le processus décisionnel de la Fed. Une telle intervention entraînerait une hausse de l’inflation et des cycles d’expansion-récession plus fréquents. Certains s’y opposeront, affirmant que la promesse de Trump d’affirmer l’autorité du pouvoir exécutif sur la Fed n’est qu’un discours vide de sens. Mais si les investisseurs privés considèrent la menace comme crédible, ils prendront en compte les attentes d’une inflation plus élevée et exigeront une compensation pour ce risque. Si un homme politique crée une instabilité dans la politique budgétaire et monétaire, les investisseurs ne feront pas ce que le gouvernement leur dit de faire.


L'ÉCONOMIE DE "L'HOMME FOU"

Presque toutes les propositions économiques de Trump réduiraient l’offre de main-d’œuvre, d’intrants industriels, de biens de consommation et les recettes fiscales fédérales. Sa stratégie entraînerait une instabilité dans l’ensemble de l’économie américaine, car les entreprises et les consommateurs craindraient à tout moment une hausse des prix ou une restriction de l’accès aux produits. Cela contraste fortement avec les politiques visant à la stabilité macroéconomique, qui ont fait leurs preuves dans le monde entier en matière de croissance durable et de faible inflation.

Face à l'incertitude économique et à la diminution des approvisionnements, ainsi qu'aux déficits budgétaires et à la flambée des prix, les investisseurs factureront au gouvernement américain des taux d'intérêt plus élevés. Les sociétés multinationales, même celles dont le siège est aux États-Unis, réduiront leurs projets d’investissement et d’emploi sur le marché américain. Ils n’auront pas à accepter les exigences de l’approche de Trump, même si leur gouvernement cède occasionnellement à des ultimatums précis à un moment donné.

Mais de telles hypothèses se sont révélées fausses dans le passé. En fait, la première administration Trump a mis en œuvre la plupart des politiques commerciales, financières et du travail promises – et les a maintenues même lorsqu’elles ont donné de mauvais résultats. Tout comme l’approche de la "Théorie de l'homme fou" (Mad Man) en matière de politique étrangère, les menaces doivent être crédibles pour avoir l’effet souhaité. Si suffisamment d’experts et d’investisseurs parient que Trump ne fera pas ce qu’il dit, ou qu’il les fera reculer si leurs prix augmentent, alors il sera obligé de les respecter pour démontrer votre ténacité. Autrement, il sera ignoré par les gouvernements et les entreprises étrangères, ce qui n’est certainement pas le résultat qu’il souhaite.

Mais le problème du programme de Donald Trump va bien au-delà du fait que sa politique nuira à l’économie américaine. Contrairement à la politique étrangère, où la création d'insécurité à l'étranger par une politique imprévisible peut donner des résultats bénéfiques dans certains cas, dans le domaine de la macroéconomie, créer de l'insécurité ne fera que nuire à la capacité productive de l'Amérique. Sur le marché mondial, Washington peut tenter de négocier avec les gouvernements. Mais les entreprises, les investisseurs individuels et des centaines de millions de citoyens ordinaires, tant au pays qu’à l’étranger, réagiront en essayant de réduire leur vulnérabilité face à l’administration Trump, et l’Amérique ne pourra ni contrôler ni empêcher de telles réactions.

En conséquence, tous les gains à court terme obtenus en faisant pression pour un mandat onéreux dans les négociations bilatérales ou dans un secteur donné seront contrebalancés par les coûts macroéconomiques liés à la création d’instabilité. C’est le défaut fondamental qui a façonné le programme de Trump, qui est radicalement différent de tout programme économique poursuivi par n’importe quel grand parti politique américain au cours du dernier demi-siècle. Si Trump gagne, il tentera au moins de transformer l’instabilité en arme par le biais de menaces, et les dommages causés à l’Amérique seront difficiles à réparer.


Adam S. Posen est président du Peterson Institute for International Economics.


Source : Adam S. Posen, “The True Dangers of Trump’s Economic Plans,” Foreign Affairs, 18/10/2024